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De nouveaux matériaux bioinspirés

7 Mars 2016, 19:09pm

Publié par Grégory SANT

Capter la vapeur d’eau de l’atmosphère, comme le font les plantes avec la rosée, pour disposer d’eau potable (Ph. Strelitzia via Flickr CCBY 2.0)

Qu’y a-t-il de commun entre un scarabée du désert de Namib, un cactus et une plante carnivore ? Des chercheurs de l’université de Harvard aux États-Unis ! En effet, ceux-ci ont marié les qualités de ces trois êtres si différents dans un nouveau matériau capable de collecter la vapeur d’eau de l’atmosphère avec une efficacité jamais atteinte jusque-là.

Les trois sources d’inspiration des chercheurs : le scarabée, le cactus et la plante carnivore (Kyoo-Chul Park et al., Nature 2016).

Une invention qui pourrait servir aux populations fragiles des pays désertiques mais également à des applications industrielles comme la désalinisation de l’eau de mer, les systèmes de déshumidification ou de climatisation, la distillation fractionnée, etc.

Un collecteur d’eau bio-inspiré

Le Ténébrion du désert (Onymacris unguicularis), scarabée qu’on trouve dans le désert du Namib, est déjà connu des ingénieurs en matériaux, qui cherchent à imiter la structure de sa carapace : érigée de centaines de petites bosselures, celle-ci capte et condense la vapeur d’eau pour fournir à son propriétaire les quelques gouttes de rosée qui lui permettent de survivre.

Le Ténébrion du désert en position de captage de la vapeur d’eau (Ph. Didier Descouens via wikicommons CC-BY-SA-4.0).

L’ingéniosité des cactus n’a pas non plus échappé aux scientifiques qui savent que leurs épines, armes redoutables contre les prédateurs, servent également à capter des gouttelettes d’eau, et à les rassembler et convoyer vers la plante, parfois même en défiant la pesanteur, grâce à leur texture et à leur forme asymétrique qui s’élargit vers la plante.

Les épines des cactus leur permettent de se défendre mais aussi de capter et diriger l’eau vers la plante (Domaine public).

Enfin, nul botaniste n’ignore l’incroyable imagination de la sélection naturelle qui a doté les plantes carnivores du genre Nepenthes d’une urne-estomac dont la surface est tapissée d’une couche particulièrement collante et simultanément glissante, précipitant vers ses sucs digestifs tout insecte qui aurait eu la mauvaise idée de s’y poser.

L’urne-estomac des Nepenthes est tapissé d’une matière très glissante (ici, spécimen hybride créé par l’homme, Ph. Yanto via Wikicommons CC BY-SA 3.0).

Impression 3D et traitements de surface

Ces trois caractéristiques ont été mariées au sein d’un nouveau matériau “biomimétique” par les chercheurs de Harvard afin d’obtenir un système de captation de vapeur d’eau dont l’efficacité est six fois supérieure aux systèmes antérieurs conçus en laboratoire.

La condensation d’eau est plus efficace sur une surface convexe (bosse du matériau fabriqué par les chercheurs) que sur une surface plate (Kyoo-Chul Park et al., Nature 2016)

Concrètement, il s’agit d’une très fine couche d’aluminium qui a été pressée entre deux moules en polymère créés par impression 3D avec les structures voulues : des bosses de scarabée prolongées par des “conduits” imitant la forme des épines des cactus (une sorte de rampe s’élargissant à partir de la bosse).

Accrocher la vapeur d’eau mais laisser filer les gouttes

Cette feuille d’aluminium à ensuite été soumise à de nombreux traitements thermiques et chimiques afin de lui donner les caractéristiques surfaciques recherchées, en particulier l’aspect hyper-glissant (hydrophobe) et adhérent de l’urne des Nepenthes.

Grâce à une “rampe” imitant la forme d’une épine de cactus, les gouttes d’eau glissent et sont canalisées, même contre le sens de la gravité (ici, vue du haut, Kyoo-Chul Park et al., Nature 2016)

Ils ont ainsi réussi, à l’aide de simulations informatiques et de tests (voir les vidéos), à doter la surface de la capacité à accrocher et garder les molécules et les microgouttelettes d’eau tout en permettant aux gouttes d’un certain diamètre de fluer sur elle sans s’accrocher. Reste à transformer cette manip de laboratoire en processus industriel…

Source : science-et-vie.com

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