Le styliste Iris van Herpen imagine des vêtements en impression 3D
/http%3A%2F%2Fs1.lemde.fr%2Fimage%2F2013%2F03%2F25%2F534x0%2F1853908_5_0fa5_la-styliste-iris-van-herpen-collabore-avec-nick_1ccc0b7648942977935d5265c7a0a170.jpg)
Imprimés en 3D, robes sculptures réalisées dans des matériaux fraîchement sortis d'un laboratoire et qui n'ont pas encore de nom, rencontre de l'architecture organique et de la recherche scientifique appliquée : Iris van Herpen, bouffée d'air frais du calendrier de la haute couture depuis 2011, s'est fait connaître grâce à sa maîtrise et son goût du high-tech. Au-delà des joies de l'expérience, cette jeune Néerlandaise surdouée y voit une façon d'envisager l'avenir de la mode.
Pourquoi ces expériences sur le high-tech sont-elles si importantes pour vous ?
J'ai besoin de matières que je ne connais pas et qui stimulent mon processus créatif. Elles rendent parfois le résultat imprévisible et m'obligent à penser de manière différente, à adopter un point de vue plus fin et plus créatif. La haute technologie est aussi importante pour moi que l'artisanat traditionnel. Dans mon travail, ils se renforcent mutuellement. Les nouvelles techniques m'inspirent pour le travail manuel et me poussent à collaborer avec d'autres "cerveaux", ce qui est très instructif. Inversement, le savoir-faire artisanal peut servir de point de départ quand je travaille avec une nouvelle technologie.
Comment trouvez-vous les laboratoires ou les compagnies de haute technologie avec lesquels vous travaillez ?
Grâce à Internet. Je collabore avec des gens de différents pays qui vivent parfois très loin. Nous sommes essentiellement en contact par e-mails ou Skype. Avec Daniel Widrig, par exemple, le premier architecte avec lequel j'ai travaillé sur l'imprimé en 3D, nous avons collaboré sur cinq tenues pour deux défilés différents mais nous ne nous sommes jamais rencontrés. Etrange, non ?
Quels rôles jouent ces nouvelles technologies dans votre travail ? Comment cohabitent-elles avec les techniques et matières traditionnelles de la mode ?
La haute couture possède une longue histoire de savoir-faire qui repose sur des matériaux et des techniques très traditionnels. Il est très important pour moi de créer ma propre vision moderne de la couture, sans me contenter de copier mon passé. C'est là que les nouvelles technologies jouent un rôle important. En les associant à des techniques traditionnelles et des matières modernes, je maximise et j'élargis mes possibilités de design. Tout se mélange de manière naturelle. La plupart des finitions d'une technologie moderne sont réalisées manuellement, ou cette technique produit une matière ou une pièce qu'il faut assembler à la main.
Quelles sont les technologies nouvelles que vous utilisez le plus dans vos collections ?
L'impression en 3D a changé ma façon de travailler. Cela m'a fait œuvrer avec des gens d'autres disciplines. Cela m'a aussi permis de réaliser combien dans le futur mon processus créatif serait différent. Quand j'ai une robe en tête, c'est toujours une image en 3D ; puis je dois la dessiner en 2D pour mon équipe. Ensuite, nous réalisons un patron en 2D avant de la fabriquer en 3D ! Je trouve cela très illogique. Je suis certaine qu'à l'avenir les gens dessineront et fabriqueront directement en 3D. Et je pense que cela convient mieux à la façon de penser d'un designer.
Vous posez-vous des limites ?
Le temps le fait pour moi : c'est mon pire ennemi et aussi mon sauveur. Sans limites de temps, je ne finirais jamais mes collections. Mais, si j'avais plus de temps, je pourrais mieux développer mes recherches et mes expériences.
Quel est votre rêve ultime en matière de haute technologie ?
Etre capable d'imprimer en 3D sur toutes les matières : le cuivre, l'or, la laine, le cuir, le verre, la soie... Le confort et la beauté atteindraient des sommets. Alors, mes seules limites seraient celles de mon imagination.
Carine Bizet Source : lemonde.fr